Tu n'as pas tellement changé
Marc Lambron
Le romancier lève le voile sur son cadet, homosexuel, mort du sida en 1995. Son texte le plus intime. Et le plus poignant. Pourquoi faut-il que les plumes trempées dans une encre noire teintée de souffrances et de douleurs soient les meilleures ? Il évoque aussi brièvement la relation de son frère avec Frigide Barjot, bien avant que celle-ci devienne la tête de proue de la manif pour tous...
« Mon frère Philippe est mort le 17 juillet 1995, un peu avant midi, dans une chambre de l'hôpital de Villejuif. Il aurait eu trente-quatre ans une semaine plus tard. C'est le seul frère que j'ai connu, le seul que j'aurai jamais. L'image de Philippe allant vers sa fin n'existe en moi que par la brûlure qu'il a entretenue pendant des années, et qui dure encore. Pour parler de lui, pour aller vers lui, je suis contraint de revenir aux zones qu'il a éclairées et calcinées. Si grand soit l'amour, si fort le passé partagé, mon frère, à partir d'un certain moment, ne m'a plus été sensible que par la blessure. C'est à cette aune que je mesure combien je l'ai connu, combien je l'ai méconnu. On peut retracer de l'extérieur la vie d'un autre ; mais le deuil ne renvoie qu'à soi, oblige à retrouver en soi le souvenir de ce qui fut. » Grasset. 144p